Fin janvier 2011, les syndicats ont lancé une initiative visant à introduire un salaire minimum en Suisse au niveau national (il existe, selon les accords et les Conventions Collectives de Travail – CCT des salaires minimum pour certains métiers, ce qui concerne environ 40% des salariés en Suisse).
Ce n’est pas la première fois puisqu’une première initiative avait été lancée en 1998, et plus récemment en 2008. Aucune n’a abouti, mais elles ont eu des effets locaux, sur certaines grandes entreprises comme Migros et Coop où des salaires minimum ont été introduits, et au niveau de certaines branches où des CCT ont pu être négociées. Mais rien au niveau national.
Ce refus « historique » s’explique par une mentalité suisse qui n’est, à l’inverse de la France, pas du tout interventionniste, et par une approche économique beaucoup plus libérale (l’introduction d’un salaire minimum général pourraient, selon les détracteurs, avoir un effet négatif sur le chômage).
Un salaire minimum a-t-il un effet positif sur l’emploi ?
La tentation de faire un parallèle avec la France est grande : on peut en effet sérieusement se demander si le SMIC a contribué ou pas à l’augmentation du chômage en France.
Si on regarde les différentes thèses, certes libérales pour certaines, l’impact du SMIC est très clairement néfaste pour le chômage, à plusieurs titres :
– le SMIC empêche les salaires de s’ajuster selon le principe de l’offre et de la demande : les métiers les plus touchés dans ce cas sont les métiers ayant le plus faible niveau de qualification, puisque le SMIC, plutôt élevé en France en comparaison internationale, rend impossible toute notion de rentabilité pour l’employeur qui, du coup, n’embauche pas ces profils.
– le SMIC empêche les salaires de croître, et notamment les salaires des personnes ayant les plus bas revenus (voir l’étude de l’iFRAP)
– le SMIC favorise le chômage des jeunes, à cause notamment de son niveau élevé (voir l’étude du Conseil d’analyse économique)
L’efficacité d’un salaire minimum dépend du niveau auquel il est fixé, par rapport au salaire moyen
Il semblerait ainsi que c’est plus le niveau du salaire minimum que sa mise en place qui soit efficace sur l’emploi. Par ailleurs, si on prend l’exemple français, on peut affirmer que c’est notamment à cause des aides, subventions, et autres interventions de l’Etat qui, cumulées au SMIC, induisent du chômage.
Au final, ce qui semble vraiment compter, c’est la différence entre le salaire moyen (ou médian) et le niveau du salaire minimum. En France, le salaire net d’un employé est en moyenne en France de 1 480 euros par mois (source : INSEE), et le SMIC est à environ 1 100 euros net par mois. En conséquence, les personnes au chômage ont parfois des réticences à travailler, phénomène qu’on connait (malheureusement) assez bien.
En Suisse, les syndicats souhaitent fixer le salaire minimum mensuel à 4 000 francs bruts, ce qui correspond pour un Suisse de 30 ans célibataire, soumis au minimum LPP, à un salaire net d’un peu plus de 3 500 francs suisses. Sachant que le salaire médian en Suisse est d’un peu plus de 5 800 francs suisses, ce qui correspond, avec les mêmes caractéristiques que ci-dessus, à un salaire net d’environ 5 100 francs suisses par mois (note : calculez vous-même votre salaire net en Suisse gratuitement sur le site Travailler-en-Suisse.ch).
Dans ce cas, on constate que le salaire minimum est beaucoup plus bas que le salaire médian, et je pense que le risque de voir le phénomène français se passer en Suisse est faible.
Ceux qui veulent soutenir l’initiative peuvent se rendre sur le site de l’UNIA et télécharger la feuille de signature.
Et vous, que pensez-vous du salaire minimum en Suisse ?
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DoM P says
Bonjour,
Je viens de découvrir votre site, qui semble intéressant.
J’ai cependant une remarque sur l’intérêt sur SMIC, en général (en dehors des cas spécifiques de la France ou de la Suisse) :
En effet, au SMIC correspond un coût minimal légal de la main d’œuvre. Or, un employeur n’embauchera jamais quelqu’un qui lui coûte ou risque de lui coûter plus qu’il ne rapporte.
Le résultat, c’est que toute personne dont la rentabilité minimale n’est pas au moins égale au coût (total) du salaire minimal que les employeurs peuvent offrir restera sur le carreau. Et ce, quel que soit le niveau du SMIC, même très bas.
Les moins aptes, les moins qualifiés, les moins adaptés aux besoins du marché sont aussi les premières victimes du SMIC.
En revanche, pour ceux qui disposent déjà d’un emploi, le SMIC peut devenir une rente de situation, si peut qu’il dépasse leur rémunération. Il devient alors confortable de brailler dans la rue comme on sait le faire en France pour obtenir du gouvernement qu’il exclue encore un peu plus de gens du monde du travail en augmentant le SMIC. C’est plus simple que de s’asseoir à la table des négociations en face du patron et lui démontrer que la rentabilité d’untel ayant augmenté, son salaire doit suivre la même voie.