Cela fait plusieurs mois déjà que des messages « inquiets » me parviennent de la part de mes contacts RH sur le terrain (en particulier des responsables d’agences de placement), m’indiquant notamment que les méthodes de recrutement et de management à la française sont en train d’envahir la Suisse romande. Le fait que ces méthodes de recrutement soient bonnes ou mauvaises, ce n’est pas vraiment la question. En revanche, on peut se demander si elles sont adaptées à la Suisse.
En fait, cette tendance semble se dessiner de manière très claire, principalement sur Genève. Le rachat par des groupes français ou internationaux d’agences de placement genevoises et suisses, la proximité de la France et la pénurie de spécialistes RH en Suisse accélèrent ce processus. Petit à petit, et de manière pratiquement imperceptible, les méthodes locales de recrutement sont influencées.
Attention, le stupide dogme du CV à la française débarque en Suisse !
Pour illustrer ce ressenti, voici une petite histoire qui m’a bien fait sourire. Une professionnel RH d’une agence de placement très connue sur Genève indiquait récemment dans une article de presse qu’un CV en Suisse, c’était 2 pages maximum… C’est pour moi une vision assez française du sujet, puisque cela dépend du profil du candidat et de son choix de présentation (j’en reparle plus loin) d’une part, et que d’autre part, les recruteurs suisses attendent d’un CV qu’il fournisse un nombre d’informations en général plus important que ce qu’un recruteur français attend.
En lisant ce commentaire, mon premier réflexe a été de me dire que cette personne était française. Ce qui, après une petite vérification sur Viadeo, a été confirmée (nous étions d’ailleurs dans la même université).
En France, il est vrai que si votre CV dépasse 2 pages, on considère que vous n’êtes pas un bon candidat puisque vous n’avez même pas eu l’intelligence de le synthétiser…
Un CV plus court et en général plus performant et percutant
Il est clair que les professionnels RH ont peut de temps pour lire un CV, et qu’un CV court sera plus rapidement parcouru, et probablement plus percutant. Il est clair également que si vous êtes un junior, envoyer un CV de 4 pages n’ira pas. A l’inverse, un profil confirmé sera bien à la peine sur 2 pages. De mon point de vue, je pousse souvent les candidats à simplifier et raccourcir leur CV… mais les mets en garde contre « l’obligation » d’avoir un CV de X pages. Rien n’est obligatoire.
Si en plus vous adoptez une présentation avec une page de garde aérée (qui peut contenir un sommaire par exemple), alors votre CV sera d’au moins 2 pages. Au final, selon ma perception, un CV en Suisse, peut faire de 1 à 4 pages. C’est large, et ça laisse le choix.
Mettre la forme au service du fond
Donc si je résume, il faut être capable de faire des CV courts mais quand même assez longs pour en dire plus. La clé de la rédaction d’un bon CV réside en fait dans la manière de présenter l’information, et de la valoriser.
Faut-il se laisser diriger par les dogmes franco-français des professionnels RH français en Suisse et proposer un CV court ? Peut-être, puisque ce sont eux qui vont décider de vous convoquer en entretien ou pas. L’idéal serait de connaître la nationalité de la personne à qui vous envoyez le CV (ce qui peut être assez facilement fait), et d’adapter légèrement votre CV : plus court pour un recruteur français, un peu plus long pour un recruteur suisse. Mais cela se complique quand on sait que votre dossier de candidature passera probablement entre plusieurs mains, surtout si vous passez le cap de l’entretien. Du coup, vous risqueriez de frustrer les autres professionnels. Donc le mieux est peut-être d’y aller à l’instinct.
Les méthodes de management à la française font des ravages dans certaines entreprises genevoises
En France, la culture du travail est bien différente de celle qu’on trouve en Suisse. Et en particulier, les relations employés / employeurs (il existe une confiance tacite entre employé et employeur en Suisse, et une défiance maladive en France), ainsi que la responsabilité de l’entreprise vis-à-vis de l’employé, responsabilité qui est liée à la souplesse du droit du travail suisse. En effet, en Suisse, le droit du travail est beaucoup moins protecteur pour les salariés qu’en France. Il est notamment possible de licencier un employé sans donner aucun motif, et sans que celui-ci ne puisse réclamer la moindre indemnité (sauf dans certains cas particuliers). De fait, la responsabilité de l’employeur est grande, et la plupart du temps, il n’y a pas d’abus. En France, le droit est tellement protecteur pour les salariés qu’un employeur qui veut se « débarrasser » d’un salarié devra soit passer à la caisse (et pas qu’un peu), soit utiliser des méthodes qui pousseront l’employé à partir de lui-même.
Mettez dans cet environnement suisse, emprunt de respect mutuel et de sens des responsabilité, un manager français avec des méthodes bien françaises, et vous créerez des crises internes très difficiles à surmonter, puisqu’on est sur le plan culturel. Et le problème, c’est que les entreprises genevoise et les salariés ne sont pas préparés à ça.
Et vous ? Avez-vous une expérience « RH » à nous raconter avec un manager français (ou étranger) ?
s.k says
Sauf erreur, il semble que votre demarche a pour but de susciter des reactions anti-recruteurs etrangers / anti-managers etrangers.
Pensez-vous qu’il soit juste de mettre tous les francais ou tous les suisses dans le meme panier?
David Talerman says
@s.k. : merci pour le commentaire. Vous avez parfaitement raison, tout le monde n’est pas comme cela, c’est très clair, et il n’était aucunement mon intention de communiquer une telle information. Disons que je parle plus d’une tendance que je trouve de plus en plus fréquente mais qui ne concerne pas tout le monde. Heureusement.
Elemer says
Je travaille ds un grand magasin ( enseigne suisse) comme conseiller de vente. La situation et bien plus critique de nos jours qu’il y a quelque’s années. Des nombreux cadres au sein du magasin sont français, leurs seuls méthodes de motivation c’est l’intimidation et la division d’équipes et des gens.Il y a des exceptions, mais c’est rare. Les entreprises Suisses engagent des français parce qu’ils ont un excellent CV ( remplis de mensonges), qui au bout d’un certain moment se révèlent décevants. Les dégâts sont considérables, parce que les clients s’aperçoivent des tensions qui existe au sein d’une équipe. Les entreprises françaises veulent appliquer la loi français sur le sol helvétique, et quand on les rappelle qu’on est en Suisse, ils disent qu’ils ne connaissent rien. Ils manquent de transparence et font mal leur travaille ( si ils le font), parce que souvent ils délèguent leurs taches aux subordonnés,qui n’osent rien dire par peur d’être viré.